CUT | Le magazine du court métrage
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La télévision, soutien capital aux courts-métrages

La télévision, soutien capital aux courts-métrages

La télévision, soutien capital aux courts-métrages

Le 7 octobre 1973, Georges de Caunes présentait la première de "Côté court", proclamant : "Le long-métrage ne nous intéresse pas, parce que tout le monde s'en préoccupe, y compris les producteurs et le public, élément essentiel du succès." Donner à voir un format méconnu, telle est encore la politique des chaînes alors que les films courts ont déserté les salles de cinéma.

Toutes chaînes confondues, la télévision programme aujourd'hui environ quarante courts-métrages originaux chaque semaine. C'est le groupe Canal+ qui arrive en tête avec près de 200 films par an et dix heures de programmation par semaine, entre "Mensomadaire", "L'œil de links", "Le petit coin des horreurs" (dévolu aux films de genre) et "Mikrociné", sur Canal+ Cinéma, où les films étrangers repérés dans les festivals internationaux (notamment Sundance) ou en présélection aux Oscars sont proposés en VOST. "On a tous des lignes éditoriales assez différentes, entre diffuseurs on est plutôt complémentaires", assure Pascale Faure, à la tête du pôle court-métrage de Canal+.

De fait, il est possible de déguster devant son téléviseur un pot-pourri de films de qualité quasiment tous les soirs de la semaine: le lundi avec "Libre court" sur France 3 et, sur Canal+, "Mensomadaire" ou "L'œil de links" en alternance ; le mardi avec "Histoires courtes" sur France 2 ; le jeudi avec "Premier clap", sur TPS Star; le vendredi avec "Court-circuit" sur Arte ; et le samedi avec "Le petit coin des horreurs" sur Canal+ et "Mickrociné" sur Canal+ Cinéma... En moyenne, chaque court métrage est multi-diffusé sur les antennes de France Télévisions et de Canal+.

"QUELQUE CHOSE D'ATTIRANT"

En vingt ans, 1.200 films et un éclectisme jamais démenti, "Libre court" de France 3 aura fait découvrir les films de nombreux cinéastes – Laurent Cantet, Matthieu Kassowitz, Alain Berliner, Mathieu Almaric ou Claire Simon... – et coproduit plusieurs court-métrages de Nicolas Philibert. Deux d'entre eux, inédits – La projection et La Nuit tombe à la ménagerie, qui s'inscrivent dans le prolongement de Nénette –, seront d'ailleurs diffusés dans la prochaine "Nuit du court", samedi 12 février.

Son responsable, Roland Nguyen, s'en réjouit : "Il y a vingt ans, on considérait que mon poste était un placard, personne n'en voulait. Là, je m'apprête à prendre à retraite et il y a cinquante candidats à ma succession. C'est le signe que nous tous, les diffuseurs, avons contribué à faire du secteur quelque chose d'attirant."

Son collègue de France 2, Christophe Taudière, confirme : "le court a une bonne image." Signe de cet effort destiné à conférer une plus grande notoriété aux courts, la création en 2010 du prix France Télévisions du meilleur court-métrage, qui sera remis cette année à Clermont-Ferrand le lundi 7 février, avec l'assurance pour le vainqueur du préachat de son film suivant.

Une manière aussi de faire connaître aux directeurs cinéma de France 2 et France 3 siégeant dans le jury des auteurs dont ils seraient susceptibles de coproduire le long-métrage. En 2010, le film lauréat, C'est gratuit pour les filles, de Marie Amachoukeli et Claire Burger, avait également décroché le César.

A la télévision, le court-métrage constitue une niche pour un public en nombre croissant et, hors antenne, un petit milieu confraternel qui ne pratique ni l'exclusivité ni la concurrence à outrance, comme c'est le cas pour les films de cinéma. Seul bémol, l'heure de programmation indue des magazines de court-métrage sur le service public. Il est loin le temps où, en 1975, "Aspects du court-métrage français" était proposé le dimanche à 21 h 30.

Si "Histoires courtes" de France 2 est mieux loti, se nichant en troisième partie de soirée, ce qui lui permet d'être inclus dans les bandes annonces de la chaîne et dedécrocher une part de marché avoisinant les 10 %, l'émission "Libre court" de France 3 est reléguée en 4e et 5e parties de soirée. Programmée vers 1 h 30 du matin, elle réunit entre 55.000 et 100.000 noctambules, tandis qu'"Histoires courtes" rassemble 250.000 personnes.

De plus, il n'est pas possible de voir les films en télévision "de rattrapage" dans les sept jours suivant la diffusion, comme c'est le cas pour les dessins animés, les feuilletons et les divertissements des antennes du service public. En revanche, "Court-circuit" d'Arte est disponible sur le site de la chaîne. Rien non plus sur France 4 (sauf pendant le festival d'animation d'Annecy) et France 5.

PRÈS DE 20% DES SOURCES DE FINANCEMENT

En février 2007 a été lancée Shorts TV, chaîne entièrement dédiée au court-métrage, accessible uniquement aux abonnés de Numéricâble, et depuis deux ans est apparu un magazine de trente minutes, "Court central", sur Orange Ciné Novo.

L'extension de la couverture de la télévision numérique terrestre (TNT) et les bonnes audiences de ces chaînes gratuites qui taillent des croupières aux hertziennes n'ont pas entraîné l'ouverture d'autres fenêtres d'exposition pour le court, alors même que le succès rencontré par les festivals de court ainsi que l'engouement pour les films originaux postés sur Dailymotion ou YouTube témoignent d'une réelle curiosité du public.

En 2009, les chaînes de télévision ont représenté un peu moins de 20 % des sources de financement du secteur, Canal+ investissant 1.100.000 euros, France 2 900.000 euros, Arte 692.000 euros, France 3.610.000 euros, suivies de Ciné Cinémas et TPS Star.

Macha Séry

26.01.2011